Le Maroc, futur hub des batteries électriques

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Le Maroc investit massivement dans l’industrie des batteries électriques, grâce à des partenariats stratégiques avec des acteurs mondiaux et une infrastructure énergétique décarbonée. Fort de ses ressources naturelles et d’une position géographique avantageuse, le Royaume aspire à devenir un hub régional de technologies durables pour l’Afrique et l’Europe.

Le Maroc s’affirme comme un acteur de premier plan dans le secteur des batteries électriques, avec des projets ambitieux et des investissements massifs, notamment en partenariat avec des géants asiatiques et européens. Ryad Mezzour, ministre de l’Industrie et du Commerce, a dernièrement révélé des engagements d’investissement atteignant 45 milliards de dollars dans cet écosystème en pleine expansion. Plus qu’une simple déclaration d’intention, ces initiatives reposent sur des atouts concrets : des ressources locales stratégiques, un environnement propice à l’innovation et une proximité géographique avantageuse avec l’Europe, qui stimule les ambitions du pays.

Parmi les projets phares, l’accord signé en mars 2024 entre le gouvernement marocain et le groupe chinois BTR New Material Group symbolise l’essor de la filière. Pour un investissement de 3 milliards de dirhams, le groupe prévoit la création d’une usine de production de cathodes, essentielles pour les batteries électriques, avec une capacité annuelle de 50.000 tonnes. Ce projet devrait générer plus de 2.500 emplois, contribuant ainsi au développement économique du pays. BTR, déjà fournisseur de constructeurs automobiles majeurs comme Tesla et Volkswagen, ouvre la voie à d’autres partenariats. D’autres groupes chinois, comme Hailiang et Shinzoom, investissent respectivement dans les pièces automobiles et les anodes pour batteries, renforçant la diversification de l’écosystème.

Ces investissements font écho à une vision stratégique : doter le Maroc d’une capacité de production de batteries pour véhicules électriques à la hauteur des attentes mondiales, tout en s’appuyant sur un coût de production compétitif. Aujourd’hui, une batterie produite au Maroc coûte près de 36 % de moins qu’une batterie similaire fabriquée en Asie, grâce notamment à un coût de l’électricité plus abordable et une chaîne d’approvisionnement locale optimisée. Cet avantage tarifaire constitue un levier de compétitivité de taille, positionnant le Maroc comme un fournisseur stratégique pour les constructeurs automobiles européens et au-delà.

Un partenariat avec la France et une ouverture vers l’Afrique

Dans cette dynamique, le partenariat entre le Maroc et la France se renforce. En visite officielle, Bruno Le Maire, ministre de l’Économie français, a réaffirmé l’importance de la coopération économique entre les deux pays, notamment dans les domaines des véhicules électriques et des batteries. Cette collaboration se manifeste aussi par des projets d’innovation en chimie, essentiels pour les nouvelles générations de batteries plus durables et efficaces. Cette alliance stratégique permettrait au Maroc de devenir un hub pour la région MENA, tout en anticipant les besoins croissants en véhicules électriques sur le continent africain.

Outre sa proximité avec l’Europe, le Maroc bénéficie d’un marché africain en pleine mutation. L’initiative de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) offre de nouvelles perspectives pour l’exportation de véhicules électriques et de composants de batteries produits localement. Samir Rachidi, président de l’Institut de Recherche en Énergie Solaire et Énergies Nouvelles (IRESEN), a souligné l’avantage compétitif du Maroc pour répondre à la demande africaine. La transition énergétique en Afrique pourrait donc bénéficier de l’expertise marocaine, en réduisant les coûts d’importation et en assurant une disponibilité locale accrue des batteries.

Des ressources naturelles et une stratégie de décarbonation ambitieuse

Pour soutenir cette ambition, le Maroc exploite des ressources naturelles stratégiques, notamment le cobalt, dont il est le dixième producteur mondial. Cet élément clé, essentiel pour la fabrication de batteries lithium-ion, confère au Maroc un positionnement unique sur la scène internationale, d’autant plus que le pays adopte une stratégie de décarbonation rapide. Cette démarche, favorisée par un accès à une électricité verte, renforcera la compétitivité des batteries marocaines sur le marché européen, alors que les nouvelles régulations imposeront une taxation carbone sur les produits importés dès 2026.

Dans cette logique, l’infrastructure énergétique marocaine, en constante amélioration, devrait évoluer vers une électricité totalement verte d’ici quelques années. L’hydrogène vert, dont la filière est en développement, pourrait également jouer un rôle dans la production de carburants synthétiques pour les transports, augmentant ainsi les capacités exportatrices du Maroc en produits durables. Cette démarche constitue une opportunité pour renforcer la balance commerciale du Royaume et d’asseoir son statut de leader régional en matière de technologie durable.

Un tissu industriel robuste et des perspectives économiques à long terme

L’industrie automobile marocaine, déjà bien établie, vient compléter ce tableau. Avec une production annuelle de 700.000 véhicules et 250 équipementiers opérant sur le territoire, le Maroc s’est hissé au premier rang des producteurs automobiles en Afrique, et se classe deuxième exportateur vers l’Europe. Cette réussite lui offre une base solide pour accueillir de nouveaux investissements dans la chaîne de valeur des batteries électriques. Les experts estiment qu’une stratégie industrielle forte permettrait d’atteindre les 400 milliards de dirhams d’investissements d’ici 2030, doublant ainsi les exportations de biens du Maroc.

Le développement des bornes de recharge constitue un autre pan stratégique. Selon Adil Bennani, président de l’Association des Importateurs de Véhicules au Maroc (AIVAM), la demande pour ces installations va croître de façon exponentielle à mesure que le nombre de véhicules électriques augmente. En Europe, les prévisions annoncent une barre des 20 millions de véhicules électriques d’ici 2025, créant ainsi un besoin en bornes de recharge dont le Maroc pourrait bénéficier en devenant un fournisseur important pour l’ensemble de la région MENA.

Une diplomatie économique tournée vers les nouvelles technologies

La diplomatie économique du Maroc s’appuie de plus en plus sur le secteur des batteries, considéré comme un levier essentiel pour attirer des investissements et renforcer sa compétitivité mondiale. La visite du ministre français Bruno Le Maire en est un exemple, mais des alliances similaires s’étendent également à d’autres acteurs mondiaux, dont la Chine, le Japon et les États-Unis. Cette dynamique diplomatique permet au Maroc de consolider sa position en tant que partenaire privilégié dans les technologies vertes.

À travers ces projets, le Maroc ne cherche pas uniquement à devenir un acteur de la batterie électrique ; il aspire à s’imposer comme un modèle de développement industriel durable pour la région MENA. En cultivant une synergie entre les ressources locales, une infrastructure énergétique décarbonée et des partenariats stratégiques, le Maroc projette d’atteindre une place de choix sur le marché mondial des véhicules électriques. La feuille de route du Royaume affirme la volonté d’anticiper les enjeux climatiques et économiques, tout en offrant à sa jeunesse et à sa main-d’œuvre qualifiée de nouvelles opportunités.

Rédaction
Rédactionhttps://www.maghreb-rechange.com
Rédacteur en chef d'Algérie Rechange, de Rechange Maroc, de Tunisie Rechange et de Rechange Maghreb.

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